Evi-Lichtungen 2018 http://evilichtungen.de
Titre du projet : « Au nom de la terre et de la mer »
Installation : Fils et lumière noire
Lieu : Mosquée Selimiye et Eglise Saint-Mauritius à Hildesheim
« Au tour d’un brasier allumé par la cupidité des uns et attisé par l’ignorance des autres, l’humanité aveuglée par la convoitise danse autours de ses cadavres et ses fossiles au nom de la terre et de la mer.
Dans tout le globe, les conflits meurtriers esquissent les mêmes expressions du mal et de la cupidité, et s’écoulent d’une même source, au nom de la terre et de la mer.
En s’octroyant impunément tous les droits terrestres et divins, les humains construisent sur des terres en colère, s’abreuvent de larmes d’innocents et mangent les fruits gorgés de cendres et de sang au nom de la terre et de la mer. Ils offensent la nature et défoncent son intimité, la vident de son essence et bouchent les oreilles pour éviter d’écouter ses cris stridents. Ils alimentent la balance du mal, s’identifient à leurs démons et se débarrassent petit à petit de leurs natures au nom de la terre et de la mer.
Dans ce chao obscure, des quatre coins du monde, s’élèvent les prières pures et immaculées comme des filons lumineux et magiques vers les étoiles pour que celles-ci répandent leurs brillances.
J’ai fermé les yeux et j’ai écouté le vide obscur, mon esprit a divagué, mes pieds se sont enracinés dans la terre comme un arbre millénaire, le vent a tendu ses doigts pour me caresser le visage, et la mer m’a chuchoté à l’oreille une prière :
« O nuit, au nom de la lumière accepte l’obscurité de mon soleil
O mer, au nom du ciel accepte la sécheresse de ma terre
O vent, au nom de l’air, accepte le sable de ma perle
O arbre, au nom de la graine de blé, accepte mes excuses »
Lorsque j’ouvris les yeux, le cœur lourd et l’esprit léger, je me suis retrouvé dans un champ intemporel entouré par des millions de végétaux et d’arbres d’âges différents, comme moi, ils se sont confondus en prières. »
Description du projet
Hildesheim, une ville de la basse saxe, s’est vu adopter sa 2éme édition de la Biennale d’Art de Lumière « Evi-Lichtungen ».
Plusieurs mois de labeurs ont conduit à 4 nuits d’exposition, 4 nuits durant lesquels la ville s’est vu illuminée et vivante de 18h à minuit. 50 000 visiteurs se sont succédés pour découvrir cette ville sous un autre charme, apprécier une nouvelle perception de leurs édifices classés.
Nous avons eu la chance de faire partie de ce projet avec une particularité, celle de travailler dans des espaces sacrés : une église et une mosquée. Une première pour nous étant donné que ces édifices sont généralement sévères en Tunisie quand il s’agit d’art. La phase de réflexion fût longue, mais le résultat concluant.
Nous voulions que nos installations et les espaces communiquent, s’échangent et s’influencent.
« Au nom de la Terre et de la Mer » brise les barrages existant entre les différentes religions et nous ramène tous ensemble dans un seul et même univers.
Avec une prière universelle, un poème que nous avons écrit en langue arabe, avec lequel nous avons ornée la crypte de l’église « Saint Mauritius », des lettres arabes éparpillées et pondues dans le jardin, représentent le spirituel et invitent le visiteur à commencer à se poser une multitude de questionnements. Le jardin et la crypte se transforment en un espace de méditation et de réflexion artistique. Les contraintes techniques bien évidemment sont toujours présentes. Interdiction de l’utilisation de la colle et du scotch aux murs, que nous avons surmonté avec l’équipe technique.
Cette même prière, en langue allemande se tenait dans la salle principale de la mosquée « Selimiye Moshee », traçant un cube rappelant la Kâbaa, chose qui a interpelé tous les visiteurs qui se mettaient à tourner autour de l’installation. D’autres contraintes sont présente à la mosquée. Nous avions à valider le contenu avec les responsables de la mosquée, qui avaient une incertitude constante mais tenaient tout de même à la réussite du projet et à leurs intégrations au parcours public d’Evi-Lichtungen.
Texte brodé au fil vert, symbole de calme, paix et sérénité, notre prière universelle s’illuminait à la lumière noire.
Réaliser de tel projet nécessite une implication communautaire afin de garantir sa réussite.
L’engagement et le dévouement de la communauté catholique comme musulmane nous a, à la fois éblouit et étaient d’une grande aide pour nous.
Afin d’accentuer cet esprit d’égalité, d’universalité et de complicité, nous avons fait accompagner nos deux installations avec une bande sonore regroupant la traduction de notre prière en une vingtaine de langues différentes. Durant deux semaines, nous avons collecté les traductions de notre poème en langues existantes à Hildesheim. Enregistrée et éditée, cette bande sonore a accompagné nos œuvres dans les deux lieux. Un moyen de plus pour nous, pour dire que nous sommes tous pareils, ces différences et ces guerres qui naissent à cause des différentes religions, des croyances, des orientations, naissent d’une haine existante.